Portrait du mois : rencontre avec Aurélie, avocate collaboratrice au Luxembourg

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Publié le 05/11/2021, par Marion Peter

On se retrouve aujourd'hui pour notre nouveau portrait du mois avec Aurélie, avocate collaboratrice au Luxembourg. Découvrez sans plus attendre son parcours d'étude, comment sa vocation est née et ses conseils pour exercer dans ce domaine.


Bonjour Aurélie, peux-tu nous parler un peu de ton parcours ?


J'ai suivi un cursus franco-allemand qui a commencé au lycée franco-allemand de Sarrebruck avec un baccalauréat/Abitur et s’est poursuivi à l’Université de la Sarre auprès du Centre juridique Franco-Allemand où j’ai pu obtenir mon DEUG (ancien diplôme universitaire national de niveau Bac+2).


La filière « Droit » est réputée pour être difficile, comment se sont passées tes années d’études ?


J’ai la chance d’avoir commencé mes études supérieures (à l'Université de la Sarre) dans une structure avec un nombre restreint d’étudiants francophones (une vingtaine contre 150 germanophones) ce qui permettait un suivi de tous les instants mais aussi une certaine exigence. A cette époque encore, j’ignorais que j’allais devenir avocate.


Les cours se passaient de la façon suivante : pour certaines matières, ils étaient donnés en langue française, pour d’autres, ils étaient dispensés en langue allemande, suivant le système allemand et nous y retrouvions nos camarades germaniques. Cette méthode fut fortement enrichissante dans la mesure où les deux systèmes sont complémentaires : le français étant plutôt théorique, le germanique, plus pratique. Mais que ce soit l’un ou l’autre, nous avions des professeurs spécialisés et passionnés, ce qui a certainement rendu ces années charnières plus faciles. En effet, c’est lors de ces années que l’on crée le socle de connaissances primordial pour évoluer.


Pour ma troisième année (L3) et jusqu’à la fin de mon parcours, je suis retournée à un système plus français avec des amphithéâtres remplis à Strasbourg. Par chance, la capitale de l'Alsace est une ville cosmopolite avec beaucoup d'étudiants venant des pays frontaliers.


Dans quelle entreprise travailles-tu aujourd’hui ?


Aujourd’hui, j’ai la chance d’exercer le métier d'avocate au sein d’une étude d’avocats de taille moyenne, spécialisée en contentieux.


Le métier d’avocat contentieux se définit d’une part, par opposition avec celui d’avocat d’affaires. En outre, l’on tendrait à croire que l’avocat contentieux est celui du litige, celui du procès, mais en réalité sa fonction est beaucoup plus large : cela va du précontentieux (négociations ou conseil avant tout projet, tout acte de type vente, les autorisations nécessaires, choix de la meilleure option fiscale), en passant par la préparation du procès et les suites de celui- ci (notamment le recouvrement des créances…).


J’y ai commencé dès la fin de mes études, un peu par hasard. En effet, j’avais à l’époque postulé en France et au Luxembourg, ne connaissant pas grand-chose du métier d’avocat au Grand-Duché. Il s’agit de la première entreprise ayant répondu à ma candidature.

De mémoire, la semaine suivante je passais mon entretien et était embauchée au titre de juriste.


Je peux donc dire que certains choix dans la vie sont le fruit de rencontres, mais également de timing : être au bon endroit, au bon moment.


Quel métier exerces-tu et depuis combien de temps ?


Au sein de ce cabinet, je suis un peu un cas unique !


En effet, j’y ai d'abord commencé en tant que juriste, sans doute ce qu’il y a de plus formateur lorsque l’on sort de l’école et de croyances très théoriques. Pendant l'exercice de ce métier, je faisais les recherches nécessaires aux dossiers, assistais mes collaborateurs lors de leurs plaidoiries et rendez-vous, puis petit à petit je participais aux avis juridiques, puis aux conclusions (dans le cadre de procédures écrites, les arguments sont développés sous forme d’écrit).


Puis est arrivé le moment où j’ai suivi des cours complémentaires afin de pouvoir devenir avocate au Luxembourg et passer les examens qui allaient avec. Ce ne fut sans doute pas la période la plus facile, puisqu’après toutes mes années d’études, il fallait une nouvelle fois réviser, se mettre à découvrir un système juridique nouveau. De mémoire, à mon époque c’était une vingtaine d’épreuves à passer en deux temps. Une fois cela réussi, il fallait encore réussir les épreuves de langue. C'est là que mon cursus franco-allemand m' a bien aidé. Au terme de ce parcours « estudiantin », j’avais le titre d’avocat…avec d’ailleurs une assermentation un 14 juillet, un clin d’œil plutôt sympathique. 😊


Mais là encore, le parcours n’était pas fini : ce n’était que le début de deux ans de stage, d’examens concomitants puis d’épreuves de sortie. Une fois ceci achevé, on devient avocat à la Cour, ce que je suis encore aujourd’hui.


Pourquoi as-tu choisi le métier d’avocate ?


Je mentirais en disant que le métier d’avocat fut une évidence pour moi. Au contraire, j’avais plutôt un a priori sur la profession.


Certains choix dans la vie sont dictés par des rencontres. J’ai en effet eu la chance de faire un stage au sein d’un tribunal pendant mon cursus. Pendant ce stage, j'ai notamment pu assister à des audiences et donc à des plaidoiries. La conviction nécessaire pour défendre des causes pas toujours simples ou encore le talent oratoire des avocats m’ont alors convaincue : ma vocation était née.


Il était devenu évident que ma place était dans un tribunal, c’est donc tout naturellement que mon choix s’est porté vers le contentieux.


Tu es avocate à la Cour et collaboratrice : qu’est-ce que ça signifie exactement ?


Le vocable « avocat à la Cour » sert à différencier l’avocat encore appelé avocat stagiaire et l’avocat qui finalement a terminé sa formation théorique et pratique. L’avocat à la Cour peut signer tous types d’actes, ce qui n’est pas le cas de l’avocat.


La meilleure définition de l’avocat collaborateur est certainement une définition par antagonisme : c’est celui qui n’est pas salarié. Celui-ci est plus en relation avec le statut au sein de l’étude pour laquelle chacun travaille/ collabore. Comme expliqué, c’est celui qui n’est pas salarié mais n’est pas non plus seul au sein de sa structure.

C’est également un vocable qui regroupe des aspects protéiformes. Certains avocats-collaborateurs restent soumis à des horaires fixes, voient leurs dossiers être exclusivement ceux de l’étude pour laquelle ils travaillent, d’autres bénéficient de plus de libertés. C’est également une qualité paradoxale puisque vous travaillez pour un cabinet tout en étant vu par les administrations comme indépendant.


Les deux statuts peuvent se cumuler, ce qui est mon cas.


Quelles sont tes principales missions ?


L’un des principaux points positifs du métier d’avocat en contentieux est que l’on ne s’ennuie jamais. Vous avez beau vous fixer des objectifs, un planning pour votre journée, en réalité, vous ne savez jamais exactement de quoi celle-ci sera faite.


Le matin, vous pouvez être en audience de plaidoiries, l’après-midi en expertise, la fin de journée à rédiger un avis. Il s’agirait là d’ailleurs d’une journée plutôt « calme », tant tout va de plus en plus à cent à l’heure.


Sans doute aussi du fait de mon parcours et notamment de mes débuts en tant que juriste, cela me permet d’être aujourd’hui un peu comme un libéro : j’interviens à différents moments du problème, tant dans la phase de conseil, de négociations, que de celle du contentieux.


Quelle avocate es-tu ? 😊


"Il faut partir du postulat qu’on ne naît pas avocat et sans doute encore moins « bon » avocat."


Et il ne faut d’ailleurs pas le croire, sinon on se satisfait de l’acquis et on ne progresse plus. On ne peut qu’essayer de le devenir à force de travail, par l’expérience, par les échecs, quand bien même ceux-ci sont toujours durs à encaisser (même dix ans après). Personnellement, je me remets en cause à chaque dossier, à chaque plaidoirie : ai-je fait de mon mieux ?


A côté de cela, même si le métier est difficile, chronophage, fait de sacrifices personnels, j’ai la chance de faire ce qui me plait et avouons-le : porter haut la confiance que votre mandant vous a confiée est un honneur.


Pourquoi avoir choisi d’exercer au Luxembourg ? Le droit est-il différent ?


Le Luxembourg a été le jeu du hasard. Mais finalement, je le vois aujourd’hui comme une évidence : les projets, et a fortiori les dossiers y sont intéressants, le mélange des cultures y est important. Le pays était donc fait pour moi.


Et surtout, le Luxembourg m’a donné ma chance.


Il suffit d’une capacité d’adaptation et le tour est joué. Après, tout dépend des matières, le droit luxembourgeois est nourri du socle napoléonien (au moins pour le droit civil) mais a ses particularités. Et quand on ne trouve pas la solution, il est possible d’aller chercher dans les droits voisins pour s’inspirer de certaines décisions. De toute façon, c’est aussi cela le métier d’avocat : jouer avec les règles et utiliser celles qui sont utiles. En d’autres termes, être ouvert.


Un dernier mot pour tous les jeunes qui souhaitent faire ce métier ?


Je n’ai pas vocation à prodiguer des conseils malgré ma petite ancienneté dans le métier.

Ce que je peux dire en revanche, c'est que s'il s'agit de votre vocation, foncez.


"Le chemin sera certainement semé d’embûches, vous allez douter, connaître des échecs, mais ne lâchez rien. On apprend à se relever et on en fait une force."


Vous aurez alors comme moi la chance d’exercer sans doute le plus beau métier du monde. 


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